Le nucléaire va-t-il faire baisser nos factures ou les faire grimper en flèche ? La question n’est plus théorique… Aujourd’hui, elle s’invite directement dans les portefeuilles des ménages et des entreprises. Entre la fin du dispositif ARENH, prévue au 31 décembre 2025, et l’arrivée d’un nouveau mécanisme dès 2026, le visage du marché de l’électricité français est en effet en pleine métamorphose.

 

Et ce grand virage ne concerne pas seulement les producteurs ou les fournisseurs ! Il touche également les consommateurs, qui verront leur facture évoluer au gré de la production nucléaire et des prix de marché. Bonne nouvelle toutefois : la régulation ne disparaît pas. Elle change de forme, avec l’ambition affichée de protéger les consommateurs tout en soutenant les investissements dans le parc nucléaire.

 

Alors, stabilité ou secousses à prévoir sur la période 2025-2030 ? Place des Énergies fait le point !

 

Des factures d’énergie en baisse en 2025… mais pas partout

 

Avant d’ouvrir la boîte noire 2026-2030, il faut bien planter le décor de 2025. Car oui, une bonne partie des Français a vu sa facture baisser au cœur de l’hiver ! Mais attention, d’autres postes pèsent dans l’ombre… et eux n’ont pas baissé.

 

Les TRV en recul en février 2025

 

La nouvelle avait été accueillie avec soulagement : au 1er février 2025, le tarif réglementé de vente d’électricité a reculé en moyenne de 15 %. Cette baisse, validée par la CRE (Commission de Régulation de l’Énergie), marque la fin du bouclier tarifaire et fait passer le tarif moyen de 281 € TTC/MWh à 239 € TTC/MWh. Les particuliers au Tarif Bleu d’EDF, ainsi que de nombreux clients d’offres indexées, ont profité directement de cette respiration bienvenue !

 

Mais attention, l’année 2025 n’a pas été figée dans le marbre… Le 1er août a marqué un nouveau tournant. Certes moins spectaculaire, mais bien réel. D’un côté, une légère baisse d’environ 3 % du prix du kWh a été appliquée. De l’autre, l’abonnement a augmenté d’environ 12 %, et surtout la TVA sur la part fixe est passée de 5,5 % à 20 %. 

 

Résultat : pour de nombreux foyers, le gain constaté en février s’est partiellement atténué au cœur de l’été. Ce changement illustre bien une réalité trop souvent oubliée : une facture, ce n’est pas qu’un prix au kWh !

 

Réseaux : hausse ciblée du TURPE

 

Pendant que le prix de l’énergie baissait, le coût des réseaux a pris la direction inverse. Le Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Électricité (TURPE) a connu une hausse exceptionnelle anticipée au 1er février 2025 : +7,7 % sur la distribution et +9,6 % sur le transport. Ce mouvement, prévu initialement pour août, a été avancé afin de couvrir l’apurement des soldes du TURPE 6 et préparer la période 2025-2028.

 

Alors, pourquoi une telle hausse ? Parce que RTE et Enedis engagent des investissements colossaux pour : 

 

  • moderniser les infrastructures, 

  • accueillir plus d’énergies renouvelables,

  • renforcer la résilience face au changement climatique. 

 

Bon à savoir : le TURPE représente déjà 20 à 30 % d’une facture TTC. Autrement dit, même si le kWh baisse, le poste réseau peut faire remonter l’addition finale. Une réalité à garder en tête quand on compare les factures !

 

2026-2030 : fin de l’ARENH, place au « Versement nucléaire universel » !

 

À partir de 2026, nous vivrons un tournant historique pour le marché français de l’électricité ! Le dispositif ARENH, en place depuis 2010, s’éteint définitivement le 31 décembre 2025. Un nouveau mécanisme prend le relais : le Versement nucléaire universel (VNU). Une chose est sûre : il va changer la donne pour tous les consommateurs.

 

Le VNU pour remplacer l’ARENH

 

Le principe est simple : EDF vendra sa production nucléaire au prix du marché, sans quota réservé aux fournisseurs alternatifs. Toutefois, si ces prix s’envolent, l’État récupérera une partie des revenus excédentaires pour la redistribuer aux consommateurs.

 

Le VNU est intégré dans la loi de finances 2025. Ce mécanisme s’applique à tous, quels que soient le fournisseur et le contrat. Contrairement à l’ARENH, il n’y aura pas de prix fixe ou de volumes garantis. En revanche, le montant redistribué apparaîtra directement sur la facture d’électricité des ménages et entreprises. Si les prix restent bas, rien ne sera prélevé ! Mais si le marché flambe… le consommateur pourra bénéficier d’une protection financière bienvenue !

 

Les seuils qui déclenchent la redistribution

 

Le VNU repose sur un système de taxation progressive. Trois paliers sont envisagés :

 

  • en dessous de 78 €/MWh, EDF conserve tous ses revenus,

  • entre 78 et 110 €/MWh, 50 % des revenus excédentaires sont prélevés,

  • au-delà de 110 €/MWh, le prélèvement grimpe à 90 %.

 

Ces seuils sont alignés sur les coûts complets de production nucléaire, calculés par la CRE. Si le marché dépasse ces valeurs, les « sur-revenus » reviennent en partie aux consommateurs. C’est, finalement, un moyen de lisser les pics tarifaires et de rendre les factures plus prévisibles.

 

Le « coût complet » de référence

 

Le fameux coût complet du nucléaire est la boussole de tout le dispositif. La CRE l’a fixé à 60,3 €/MWh pour la période 2026-2028 et à 63,4 €/MWh pour 2029-2031. Ces montants servent de repères pour déterminer les seuils de déclenchement des prélèvements VNU.

 

À ce jour, voilà où nous en sommes pour la première année charnière du dispositif : en 2026, les revenus prévisionnels issus du nucléaire sont évalués à 65,86 €/MWh. Nous sommes légèrement au-dessus du coût complet, mais en dessous du premier seuil de taxation. Ainsi, si ces prévisions se confirment, aucune redistribution VNU n’aura lieu en 2026. Le mécanisme jouera alors pleinement son rôle uniquement si le marché grimpe au-delà des seuils fixés.

 

Le nucléaire, entre production et effets sur les prix

 

Bien que le monde entier (dont la France !) avance sur les énergies renouvelables, le nucléaire reste la colonne vertébrale de la production électrique française. Et quand la disponibilité du parc est élevée, cela pèse sur les prix… dans le bon sens !

 

Les volumes 2025-2027 pour le nucléaire en France

 

EDF prévoit une production située entre 350 et 370 TWh par an sur la période 2025-2027. Cette estimation intègre la mise en service de Flamanville 3, ce qui renforce les capacités disponibles. Eh oui ! Une production plus abondante, c’est généralement une pression à la baisse sur les prix de gros… donc une meilleure stabilité pour les consommateurs.

 

Ces volumes représentent un net rebond par rapport aux années de forte maintenance post-Covid et à la crise de corrosion sous contrainte de 2022-2023. En clair, le parc nucléaire français revient en force ! Et plus le parc fonctionne efficacement, plus le VNU a des chances de rester en veille, sans prélèvement massif.

 

Et si les prix de marché flambent ?

 

Le vrai enjeu est là : la volatilité du marché. Nous l’avons évoqué, si les prix dépassent les seuils du VNU, une partie des revenus est automatiquement redistribuée aux consommateurs. Concrètement, ça veut dire quoi ? Cela signifie que lors de pics de marché, une réduction s’appliquera sur les factures.

 

Voilà une différence majeure avec l’ARENH, qui plafonnait les volumes mais pas les revenus ! Ce mécanisme est donc pensé comme une soupape : il laisse EDF vendre au prix du marché, tout en garantissant aux consommateurs une protection contre les flambées.

 

Les autres briques qui comptent sur la facture d’électricité

 

Parce que, non, la facture d’électricité ne dépend pas uniquement du prix du kWh ! Réseaux, taxes et mécanismes moins visibles ont un poids considérable dans le montant final payé chaque mois.

 

Les réseaux et les investissements

 

Le TURPE représente 20 à 30 % d’une facture d’électricité. Cette part est vouée à augmenter avec les investissements massifs de RTE et Enedis. Or, entre 2023 et 2028, RTE prévoit une hausse de ses investissements de 2,1 à 6,2 milliards d’euros, Enedis de 5 à 7 milliards d’euros. C’est colossal ! Pour financer ces chantiers, le TURPE 7 a été revu à la hausse dès février 2025. En bref, ces investissements sont essentiels pour la transition énergétique, mais ils pèsent inévitablement sur les factures.

 

Les taxes et accises sur l’électricité

 

Autre poste incontournable : la fiscalité ! L’accise sur l’électricité (anciennement TICFE) est repassée en 2025 à son niveau d’avant-crise, soit 33,70 €/MWh contre 21 €/MWh en 2024. Elle s’ajoute à la TVA (5,5 % sur l’abonnement et 20 % sur la consommation). Ces taxes sont indépendantes du prix de l’énergie… ce qui signifie qu’une baisse du TRV ne compense pas forcément tout !

 

À retenir : le retour de cette fiscalité plus lourde explique pourquoi certaines factures n’ont pas autant diminué qu’espéré en 2025, malgré la baisse des tarifs réglementés.

 

Le mécanisme de capacité

 

Souvent méconnu, ce poste peut pourtant apparaître clairement sur la facture. Le mécanisme de capacité vise à assurer la sécurité d’approvisionnement en période de pointe. Les fournisseurs achètent des garanties de capacité pour répondre à la demande hivernale… et ces coûts sont répercutés aux clients.

 

Or, en 2025, ce poste pèse plus lourd que les années précédentes, en raison d’une forte tension sur certaines périodes de pointe. Ce n’est pas le poste principal de la facture, mais il mérite d’être connu pour bien comprendre chaque ligne de son relevé !

 

Nucléaire et influence sur les factures, en bref

 

Vous l’aurez compris, le grand virage nucléaire ne s’arrête pas en 2026. Il amorce au contraire une nouvelle ère ! Le VNU, en lien direct avec la production nucléaire nationale, pourrait devenir un outil majeur de stabilité… à condition, bien sûr, que le parc nucléaire tienne ses promesses. À cela s’ajoutent des investissements massifs dans les réseaux et la transition énergétique, qui dessineront les factures des années à venir.

 

Bref, rien n’est figé : les prix évolueront au gré des marchés, mais aussi des décisions politiques et industrielles. Ce qui est sûr, c’est que les consommateurs seront moins spectateurs et davantage protégés face aux pics tarifaires. Alors, envolées ou accalmies ? Le match entre régulation et marché est lancé… et il s’annonce passionnant !

 

À lire aussi : Le plan énergie pour sortir la France des énergies fossiles

 

Sources : 

 

https://www.service-public.gouv.fr/particuliers/actualites/A18001

 

https://www.connaissancedesenergies.org/afp/prix-de-lelectricite-les-regles-changent-en-2026-quelles-consequences-pour-vos-factures-251002

 

https://www.cre.fr/fileadmin/Documents/Communiques_de_presse/2025/250930_CP_CRE_Couts_complets_nucleaire.pdf

 

https://www.cre.fr/fileadmin/Documents/Communiques_de_presse/2025/250930_CP_CRE_Estimation_revenus_nucleaires_EDF.pdf

 

https://www.vattenfall.fr/le-mag-energie-pro/versement-nucleaire-universel

 

https://www.lemonde.fr/planete/article/2025/02/13/electricite-le-plan-a-94-milliards-d-euros-de-rte-pour-adapter-le-reseau-d-ici-a-2040_6544403_3244.html

 

https://www.cre.fr/fileadmin/Documents/Rapports_et_etudes/2025/Rapport_de_surveillance_2024.pdf

 

https://www.edf.fr/groupe-edf/espaces-dedies/journalistes/tous-les-communiques-de-presse/estimation-de-production-nucleaire-en-france-pour-2025-2026-et-2027